John Oxenham

Plusieurs raisons nous ont incités à inviter l’auteur de cet article: d’une part, l’Ouganda est notre partenaire depuis des années: l’IIZ/DVV a entamé sa collaboration dans ce pays avec une antenne et y travaille aujourd’hui, par le biais de l’organisation Action conjointe pour l’éducation des adultes en Ouganda (Uganda Joint Action for Adult Education – UJAFE, e-mail: ujafae@imul.com), avec de nombreux partenaires du domaine de l’éducation des adultes, organismes publics, de la société civile et universitaires; d’autre part, l’intérêt renouvelé que la Banque mondiale porte à l’éducation, et qui se manifeste dans des projets entrepris dans plusieurs pays africains, dont l’Ouganda, devrait nous réjouir. Enfin, il conviendrait sûrement de saluer le fait que toute une équipe, dont nos partenaires ont fait partie, se soit consacrée à l’évaluation de l’alphabétisation. – Le Dr. John Oxenham entretient depuis des années le dialogue avec notre institut et à déjà rédigé auparavant des articles pour notre revue. Ces dix dernières années, il a travaillé pour la Banque mondiale où il a fait partie des responsables d’une évaluation qu’elle a réalisée sur les projets qu’elle a financés ces 25 dernières années dans le domaine de l’éducation des adultes. John Oxenham profite d’une retraite «active» et continue à s’intéresser de près à l’éducation des adultes. Pour le joindre, adressez-vous à: Joxenham@worldbank.org.

Réflexions suggérées aux éducateurs d’adultes par une évaluation ougandaise

Synthèse

À la mi-1999, le gouvernement ougandais chargea le département d’études sur l’éducation des adultes et la communication de l’université de Makerere de procéder à l’évaluation à l’échelle nationale du Programme national d’alphabétisation fonctionnelle des adultes (FAL). L’équipe d’évaluation se pencha sur un échantillon de près de 800 adultes, en majeure partie des femmes, qui avaient suivi avec succès un cours du FAL. Elle prit aussi en compte des groupes témoins d’adultes analphabètes et d’élèves de 3e et 4e années d’école primaire ainsi que plus de 100 formateurs. Dans leurs implications pour les éducateurs d’adultes en général, ses conclusions révèlent que:

  • l’éducation des adultes/les cours d’alphabétisation atteint/atteignent vraiment ses/leurs groupes cibles, dans le sens qu’ils touchent réellement des personnes défavorisées, spécialement des femmes pauvres; ils sont aussi fréquentés par un pourcentage élevé de femmes pauvres qui ont été scolarisées, mais pas assez pour satisfaire leurs objectifs personnels;
  • les adultes de tout âge apprennent plus vite à lire, à écrire et à calculer que les élèves du primaire et n’ont pas oublié ce qu’ils ont appris deux ans après la fin de leurs cours; il semble inutile de fixer une limite d’âge pour participer aux cours;
  • les personnes formées ont tendance à être mieux informées des questions de développement, à avoir des opinions plus «modernes» et à être plus enclines à adopter des pratiques «modernes» que les adultes analphabètes qui n’ont jamais suivi de cours d’alphabétisation;
  • l’aptitude des adultes à maîtriser les compétences et les informations dispensées par un cours d’alphabétisation fonctionnelle est fort diverse; les programmes existants et les méthodes pédagogiques n’offrent que des réponses inadéquates à ce problème;
  • un critère déterminant du succès des participants est la qualité de la mise en œuvre du programme;
  • l’État et les organisations non gouvernementales fournissent des cours de formation des adultes efficients; un partenariat étroit entre eux est probablement ce qu’il y a de plus profitable pour les personnes qu’ils visent à servir;
  • les fournisseurs devraient planifier moins en termes «d’alphabétisation de base» et de «post-alphabétisation» que selon des critères de formation continue et de formation tout au long de la vie;
  • les planificateurs et concepteurs de programmes continuent à sous-estimer les connaissances que possèdent les analphabètes; il se peut qu’ils surestiment aussi l’importance du savoir «fonctionnel» car les participants sont avant tout désireux de savoir lire et écrire;
  • la formation fournie ne démotive pas les participants; aucune méthode spécifique ne semble supérieure aux autres dans le développement des compétences d’alphabétisation ou dans la promotion d’attitudes et de pratiques porteuses de développement social et économique;
  • les formateurs volontaires, bénévoles et peu encadrés, peuvent être aussi efficients que ceux qui sont rémunérés et bien encadrés.

Introduction et contexte

Le présent article s’attache à tirer les enseignements d’une évaluation de l’éducation de base des adultes par programmes d’alphabétisation en Ouganda, à l’intention des éducateurs d’adultes. L’évaluation a été effectuée en 1999. Le premier rapport, qui compte quelque 300 pages, a été largement diffusé en Ouganda même. Un version abrégée d’environ 140 pages, sera publiée à la mi-2000. La version abrégée en français devrait être diffusée vers la fin de l’année 2000.

Les évaluations de cette envergure et aussi représentatives sont rares (voir p. ex. Lind, 1996, pour la Namibie). De même, peu d’entre elles ont eu la possibilité de recourir à des groupes témoins d’adultes illettrés et d’élèves de l’école primaire pour évaluer les contributions actuelles des programmes d’éducation sur le savoir, les aptitudes et les compétences (voir par exemple, Archer & Cottingham, 1996, sur le Bangladesh, le Salvador et l’Ouganda). Les conclusions et les implications de cette évaluation sont importantes pour la théorie, la politique et la pratique de l’éducation de base des adultes dans le domaine de l’alphabétisation.

Depuis 1992, le gouvernement ougandais met en œuvre un «Programme de post-alphabétisation fonctionnelle» (FAL). Il a ainsi réanimé des efforts entrepris dans les années quarante qui avaient été redoublés après l’indépendance en 1962. L’organisme responsable en est le département du développement communautaire du ministère des Genres, du Travail et du Développement social. Vers la mi-1999, le FAL couvrait 26 des 45 districts administratifs au sein des 8 grandes régions administratives.

En plus du gouvernement, plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) ont lancé des programmes locaux d’éducation de base des adultes.

Bien qu’on ait soumis le FAL à une révision en 1995, on n’avait encore procédé à aucune évaluation sur une grande échelle de son impact à long terme. En 1999, sur la recommandation de la Banque mondiale et avec le soutien du gouvernement norvégien, le ministère des Genres, du Travail et du Développement communautaire chargea le département d’études sur l’éducation des adultes et la communication de l’université de Makerere de procéder à l’évaluation du FAL et des programmes proposés par les ONG. L’équipe d’évaluation acheva son enquête en juin 1999 et soumit son premier rapport en septembre de la même année.

Résumé de l’évaluation

Quelles questions les évaluateurs ont-ils abordées?

L’évaluation s’est concentrée sur l’impact à long terme du FAL et des programmes mis en œuvre par les ONG. Elle s’interrogeait sur les points suivants:

  • Qu’ont retenu les adultes, qui ont suivi avec succès un cours d’alphabétisation du FAL ou d’une ONG, au niveau de la lecture et de l’écriture de textes et du calcul sur papier?
  • Dans quelle mesure utilisent-ils leurs compétences en matière de lecture, d’écriture et de calcul?
  • Comparé aux adultes analphabètes qui ne se sont pas inscrits à un cours d’alphabétisation, [a] de quel degré d’information et de connaissance des thèmes «fonctionnels» font-ils preuve?; [b] quelles sont leurs opinions sur des thèmes «fonctionnels»?; et [c] dans quelle mesure mettent-ils en pratique ce qu’ils ont appris sur les thèmes « fonctionnels»?
  • Étant donné qu’il existe plusieurs approches d’alphabétisation, quelle est la plus efficiente et quels sont leurs coûts respectifs? En particulier, quelles sont les similitudes et les différences entre l’approche REFLECT et les autres?

L’évaluation n’a pas porté directement sur les inscriptions, l’assiduité, les taux d’achèvement ou de réussite ou le déroulement des cours proprement dits. Elle n’a pas examiné la qualité des matériels pédagogiques et n’a pas observé non plus comment les formateurs aidaient leurs participants à apprendre à lire, à écrire, à compter et à maîtriser les thèmes «fonctionnels». Toutefois, les évaluateurs ont interrogé des participants et des animateurs sur leurs souvenirs relatifs aux cours d’alphabétisation ainsi que sur leur biographie et leurs conditions de vie.

Comment l’évaluation a-t-elle abordé les questions?

A) Méthodes

Pour mesurer les compétences en matière de compréhension, d’écriture et de calcul, les évaluateurs ont élaboré toute une série de tests dans la langue d’enseignement, basés sur les matériels pédagogiques utilisés. Les participants devaient lire les questions et écrire les réponses. On a soumis aux tests des personnes qui avaient réussi le test final d’un cours du FAL ainsi que des élèves de 3e et 4e années d’école primaire.

Pour évaluer le niveau d’information et de connaissance des thèmes fonctionnels, les évaluateurs ont repris les matériels pédagogiques utilisés comme base d’un test où un évaluateur posait une question à laquelle la personne interrogée répondait oralement.

Pour évaluer les opinions et les pratiques, les évaluateurs conçurent un questionnaire destiné à être utilisé dans des entretiens particuliers avec d’une part des personnes ayant achevé avec succès leur cours d’alphabétisation et de l’autre avec des analphabètes qui ne s’étaient jamais inscrits à aucun cours de ce genre. Le questionnaire couvrait la palette des questions de «modernisation» que traitait le programme. Les interviews sur les connaissances, les opinions et les pratiques étaient faites avec les personnes qui avaient suivi avec succès le cours du FAL et avec des personnes analphabètes n’ayant jamais fréquenté de cours du FAL.

Pour connaître le milieu dans lequel vivaient les personnes formées dans les cours d’alphabétisation, les évaluateurs observèrent soigneusement le quartier dans lequel vivaient les personnes qui avaient suivi avec succès les cours d’alphabétisation et les personnes analphabètes qui ne s’étaient pas inscrites à des cours de ce genre.

Enfin, en plus des entretiens personnels et des visites à domicile, les évaluateurs organisèrent des groupes focaux pour discuter des cours d’alphabétisation.

B) Échantillonnage

Pour obtenir un échantillon valable de personnes formées avec succès, les évaluateurs commencèrent par identifier les 26 districts dans lesquels étaient mis en œuvre des programmes d’alphabétisation. Puis, ils sélectionnèrent un district qu’on leur conseilla dans chacune des 8 régions administratives de l’Ouganda. Deux régions furent malheureusement exclues pour des raisons de sécurité. Les évaluateurs gardèrent néanmoins 8 districts, mais les répartirent entre les 6 régions restantes.

Ensuite, les évaluateurs demandèrent aux autorités de chaque district la liste de toutes les personnes qui avaient suivi avec succès un cours d’alphabétisation. Sur ces listes, ils prirent un échantillon au hasard de 100 personnes formées par district, ce qui donna un échantillon total de 800 personnes formées.

Par ailleurs, les évaluateurs demandèrent aux autorités de chaque district d’inviter

  • 20 adultes illettrés ne s’étant jamais inscrits à un cours d’alphabétisation pour les interroger sur leurs connaissances, leurs opinions et leurs pratiques dans le domaine des thèmes «fonctionnels» (il fallait donc inviter un échantillon total de 160 personnes);
  • une des meilleures écoles primaires du district autorisa quelques-uns de ses élèves de 3e et 4ee et 4e années suivent encore un enseignement dans leur langue locale car ils commencent tout juste à apprendre l’anglais); années à se soumettre à la série de tests pour «adultes» en lecture, écriture et calcul dans la langue d’enseignement (les élèves des 3
  • un certain nombre de formateurs en vue de les interviewer – un total de 118 formateurs dans 8 districts prêtèrent leur assistance à l’évaluation;
  • quelques leaders communautaires et officiels afin de les interviewer sur leurs impressions du cours d’alphabétisation.

Quelles constatations l’évaluation a-t-elle faites?

La prochaine partie se contentera de rendre compte des principales constatations de l’évaluation sans ajouter beaucoup de commentaires sur les aspects qui pourraient plus particulièrement intéresser les éducateurs d’adultes. Elle attirera toutefois l’attention sur les points particulièrement frappants.

1re question: qu’ont retenu les adultes qui ont suivi avec succès un cours d’alphabétisation du FAL ou d’une ONG au niveau des textes écrits et lus et du calcul écrit? Avant de répondre à cette question, il faut noter un fait surprenant: près des trois quarts des personnes formées avec succès avaient fréquenté l’école primaire! Plus d’un tiers même d’entre elles l’avait fréquenté entre 5 et 8 ans. Cela vient probablement du fait que l’on n’a pas pris en compte tous les participants aux cours d’alphabétisation, mais seulement ceux qui les ont terminés avec succès. Mais même ainýi, cela soulève des questions sur la manière dont les apprenants sont recrutés, sur la composition des groupes d’apprenants et le taux de réussite des apprenants qui n’ont pas été scolarisés. Les graphiques 1 à 4 indiquent le pourcentage de réponses correctes de l’échantillonnage adulte total, de trois sous-groupes de l’échantillon et les élèves de 4e année primaire (comme il fallait s’y attendre, les élèves de 4e année ont obtenu de meilleurs résultats à tous les tests que les élèves de 3e année).

Sur les trois premiers graphiques, on constate que tous les groupes adultes ont obtenu de meilleurs résultats que les élèves de 4e année. En écriture, les élèves de 4e année ont cependant été légèrement meilleurs en moyenne que les groupes adultes et 6 pour cent meilleurs que les adultes qui n’avaient jamais fréquenté l’école. On commentera cette constatation un peu plus tard.

Graphique 1 - Compréhension simple: pourcentages de réponses correctes

Graphique 1 - Compréhension simple: pourcentages de réponses correctes

Graphique 2 - Compréhension complexe: pourcentages de réponses correctes

 Graphique 2 - Compréhension complexe: pourcentages de réponses correctes

Graphique 3 - Calcul: pourcentages de réponses correctes

 Graphique 3 - Calcul: pourcentages de réponses correctes

Graphique 4 - Écriture: résultats moyens en pourcentage obtenus par ceux qui ont passé récemment le test d'écriture

Graphique 4 - Écriture: résultats moyens en pourcentage obtenus par ceux qui ont passé récemment le test d'écriture

2e question: dans quelle mesure les sortants utilisent-ils leurs compétences en lecture, écriture et calculz? La grande majorité des diplômés – 80 pour cent – ont relaté qu’ils avaient utilisé et valorisé leurs nouvelles compétence et connaissances. Soixante pour cent ont indiqué qu’ils étaient impliqués dans des activités génératrices de revenus liées à leurs cours et à leurs aptitudes et qu’un des résultats était une amélioration de leurs conditions de vie. Les 20 pour cent qui ont indiqué qu’ils ne faisaient pas ou guère usage de leurs compétences, sentaient qu’ils n’avaient pas atteint un niveau suffisant pour les appliquer avec succès.

En ce qui concerne leurs aspirations à un apprentissage futur, près de la moitié des sortants voulaient apprendre l’anglais. Les autres souhaits n’ont été exprimés que par un petit pourcentage de personnes interrogées.

3e question: comparé aux adultes illettrés qui ne s’étaient pas inscrits à des cours d’alphabétisation, [a] quels niveaux d’information et de connaissances des thèmes «fonctionnels» les personnes ayant achevé leur formation avec succès présentaient-elles; [b] quelles étaient leurs opinions relativement aux thèmes «fonctionnels»; et [c] dans quelle mesure mettaient-elles en pratique ce qu’elles avaient appris sur ces thèmes «fonctionnels»? Les tableaux 1 et 2 ci-dessous présentent certaines de ces constatations. Ils semblent indiquer que dans ces trois domaines, elles surpassent les illettrés. Néanmoins, ces résultats amènent à se poser des questions relatives à la causalité et au degré. Le tableau 1 liste les 13 questions sur le savoir et compare les pourcentages de réponses correctes données par des personnes [a] ayant suivi avec succès un cours d’alphabétisation deux ans auparavant, [b] en ayant réussi un récemment [c] analphabètes. Le tableau 2, qui recourt aux mêmes groupes, présente une comparaison entre les opinions et les pratiques.

Concernant les deux tiers des questions relatives au savoir, les diplômés obtenaient 10 pour cent de points de plus ou même plus que les illettrés: cela indique que les diplômés sont bien mieux informés que les illettrés. De plus, les personnes qui avaient achevé le cours 2 ans auparavant s’en tiraient aussi bien – et quelquefois même mieux – que les sortants récents. Oublier ce qu’on a appris ne semble pas être un problème. Mais sur un tiers des questions, l’écart entre les personnes formées et les analphabètes était inférieur à 10 pour cent. Cela semble indiquer que le programme ne transmettait pas de nouvelles informations, mais que ces informations sont déjà connues de larges couches de la population.

Tableau 1: Pourcentages par groupe ayant répondu correctement aux questions sur le savoir fonctionnel (réponse correcte indiquée entre parenthèses)

Question Personnes alphabétisées depuis deux ans Personnes récemment alphabétisées Analphabètes Tous les groupes 95% CI
1. Quels aliments suivants donnent de l’énergie? (maïs) 35 40 27 36 25-47
2. Qu’est-ce qui, ci-après, protège le corps contre la maladie? (légumes) 48 51 46 48 37-59
3. Quelle est par-mi les maladies suivantes celle qui est causée par les mouches? (diarrhée) 94 92 77 90  
4. De quel trouble est-il impossible de se protéger par vaccination? (diarrhée) 55 57 37 53  
5. Quelle maladie peut-on attraper quand on ne se lave pas les mains? (diarrhée) 93 94 78 91 84-98
6. Quelqu’un peut-être séropositif/avoir le sida sans présenter de symptômes? (oui) 68 78 54 70 59-81
7. Si vous viviez avec quelqu’un qui est séropositif/a le sida, est-ce que vous prendriez des précautions? (oui) 64 66 33 60 49-71
8. Quelles sont les principales raisons de planifier sa famille? 90 87 64 87 79-94
9. Quels sont les principaux avantages de l’allaitement? 87 88 70 84 76-92
10. Tous les combien vote-t-on pour le président? (tous les cinq ans) 76 79 56 74 64-84
11. Combien de personnes compte l’exécutif (LCI)? (10) 26 30 13 25 15-35
12. Que peut-on utiliser à part les engrais? 57 56 52 56 45-67
13. Comment peut-on lutter contre les bêtes nuisibles? 64 60 71 64 53-75

Le tableau 2 présente deux phénomènes sur les opinions et les pratiques. Il indique cinq questions sur les attitudes et les compare avec cinq questions correspondantes sur les pratiques. Ce qui ressort, c’est qu’une plus grande part de personnes formées que d’analphabètes exprime des opinions modernes et adopte des pratiques modernes. Toutefois, ce qui ressort également, c’est qu’il est plus facile à une plus grande partie des personnes formées et analphabètes d’exprimer des opinions modernes que de les mettre en pratique. Ceci étant, le savoir et les opinions n’entraînent pas automatiquement des pratiques appropriées ou cohérentes.

Tableau 2: Réponses modernes en matière d'opinions comparées aux réponses modernes en matière de pratiques

Questions Diplômés depuis 2 ans
% réponses«modernes»
Nouveaux diplômés
% réponses «modernes»
Analphabètes
% réponses «modernes»
Question opinion 1:

on ne doit pas planifier sa famille car les enfantssont un don de Dieu. //

Question mise en pratique 14: pratiquez-vous le planning familial?

76 71 55
39 47 15
diff. -37 diff. -24 diff. -40
Question opinion 2:

les fruits, c'est pour les enfants. //

Question mise en pratique 1: avez-vous mangé des fruits la semaine dernière?

91 84 82
96 95 80
diff. +5 diff. +11 diff. -2
Question opinion 6:

hommes et femmes doivent se partager également la surveillance des enfants. //

Question mise en pratique 7: qui emmène en général les enfants à l'hôpital?

92 93 84
22 23 20
diff. -70 diff. -70 diff. -64
Question opinion 15:

quand une femme gagne de l'argent, elle doit en donner la plus grande partie à son mari. //

Question mise en pratique 6: (posée seulement aux femmes): avez-vous des revenus dont vous pouvez disposer seule?

67 74 64
72 66 57
diff. +5 diff. -8 diff. -7
Question opinion 16:

le meilleur moyen de prospérer est de coopérer plutôt que se faire concurrence. //

Question mise en pratique 15: êtes-vous membre d'un groupement ou d'une association?

92 91 90
69 50 25
diff. -23 diff. -41 diff. -65

4e question: comme il existe plusieurs approches en matière d'alphabétisation, quelle est la plus efficiente et quels sont leurs coûts comparatifs? En particulier, comment s’en tire l’approche REFLECT par rapport aux autres? Comme on le verra, les évaluateurs n'ont pu comparer que quelques classes FAL et REFLECT. Les tableaux 3, 4 et 5 présentent les données selon ces trois perspectives.

À première vue, l'approche REFLECT semble vraiment plus efficiente en matière d'enseignement de la lecture, de l'écriture et du calcul. Cependant, quand on prend en compte une éventuelle scolarité antérieure, REFLECT ne semble plus efficiente qu'en ce qui concerne les participants qui ont été scolarisés le plus longtemps alors que les méthodes du FAL semblent plus efficientes quand on a affaire à des adultes illettrés. Pour illustrer ces points, le tableau 3 présente les résultats moyens en pourcentage par type de programme et montre que les groupes REFLECT devancent de loin les groupes de FAL et l’échantillon total sur les quatre aspects testés. Le tableau 4 présente les groupes échantillonnés selon leur niveau d'éducation et révèle que les groupes REFLECT ont fréquenté l'école plus longtemps que les groupes FAL. Enfin, le tableau 5 montre l'image la plus complexe car les réussites sont analysées en fonction du niveau de scolarité.

Les tableaux 3, 4 et 5 comparent les résultats uniquement dans le domaine de la compréhension, de l'écriture et du calcul. Les personnes formées par FAL et REFLECT présentent-elles des différences dans les trois autres volets du programme, les connaissanÙes, les opinions et les pratiques? Cette évaluation semble indiquer que ce n'est pas le cas. Toutefois, elle omet d'indiquer que quelques-uns des cours REFLECT ne fonctionnaient que depuis relativement peu de temps.

Table 3: Résultats moyens en pourcentage par type de programme

District Type de programme N Compréhension simple Calcul Compréhension complexe Écriture (essais) Écriture (chacun)
  Groupe témoin total 793 93,9 66,6 49,5 52,3 39,3
1.APAC FAL 52 86,1 53,8 32,9 43,0 32,4
  REFLECT 26 97,7 86,3 65,7 55,6 49,2
2.MUBENDE FAL 29 98,9 64,8 49,7 41,0 35,3
  REFLECT 70 97,1 69,7 60,7 46,0 40,1

Table 4: Nombre de personnes présentant différents niveaux de scolarité dans les programmes fal et reflect des districts d'Apac et de Mubende

  Apac Mubende
  FAL REFLECT FAL REFLECT
Jamais scolarisés 35 0 20 17
1-4 ans 17 3 5 30
5-8 ans 2 21 2 43
Total 64 24 27 90

Table 5: Résultats moyens de trois tests dans les programmes fal et reflect selon le niveau de scolarité

  Calcul Compréhension Écriture
  FAL REFLECT FAL REFLECT FAL REFLECT
Jamais scolarisés 45,3
(n=55)
28,4
(n=17)
27,2 22,2 25,6 17,9
1-4 années 58,1
(n=22)
64,7
(n=33)
35,6 52,9 29,6 35,8
5-8 années 76,9
(n=4)
86,3
(n=64)
57,6 73,5 44,0 47,3

Enfin, quels ont été les coûts des programmes? Les estimations les plus fiables – en prenant en compte les difficultés bien connues et les précautions à prendre en calculant les coûts des programmes d'éducation des adultes – semblent indiquer que pour alphabétiser quelqu'un avec succès, il faut à:

FAL  4–5 US$ par adulte formé;
REFLECT  12–15 US$ par adulte formé;
SOCADIDO  20 US$ par adulte formé;
4e année d'école primaire:  60 US$ par élève terminant la 4e année en quatre ans.

Les estimations relativement basses pour FAL résultent du fait que ce programme ne rémunère pas ses alphabétiseurs; alors que pour REFLECT, il se peut qu'on ait négligé quelques coûts de développement significatifs. L’ONG SOCADIDO paie à ses formateurs une rémunération mensuelle relativement élevée.

Discussion des constatations

La toute première observation, qui sera discutée plus bas, est que 200–300 heures d'instruction dispensées par des maîtres relativement peu formés peuvent donner les moyens à des adultes tout à fait illettrés, même âgés, d'atteindre un niveau de compétences en lecture, écriture et calcul équivalent à celui d'enfants qui ont passé trois ou quatre ans dans une école primaire. Quel que soit le genre de réflexions que cette constatation puisse inspirer sur les écoles primaires concernées, elle donne raison aux éducateurs d’adultes qui affirment que la capacité des adultes à acquérir de nouvelles aptitudes persiste à l'âge mur.

Une seconde observation très importante qui ne se dégage pas du résumé ci-dessus est que le principal facteur qui expliquerait les différences entre les résultats obtenus dans les 8 districts pris en compte serait la qualité de la mise en œuvre des programmes locaux. Il est vrai que l'évaluation ougandaise a été faite entièrement a posteriori et qu'elle n'a donc pu prendre en compte la manière dont chaque programme local était organisé, géré et encadré – sans parler de chaque groupe d'apprentissage – et d'entreprendre ensuite des comparaisons systématiques entre elles. Son observation est une simple conclusion par élimination après une analyse par régression de plusieurs autres facteurs. Elle se voit confirmée par la longue et méticuleuse préparation et mise en œuvre des campagnes locales les plus réussies de la Total Literacy Mission (Mission d’alphabétisation totale) en Inde et de l'expérience Ajmer ainsi que les immenses efforts d'organisation déployés à Cuba, en Équateur, en Namibie et au Nicaragua.

Un troisième signal est que les programmes mis en œuvre par les gouvernements peuvent être aussi efficients et éventuellement moins onéreux que ceux offerts par d'autres organisations. Cela corrobore non seulement les expériences mentionnées ci-dessus, mais aussi celles de deux programmes encouragés par des prêts de la Banque mondiale: le programme de vingt ans mis en œuvre par le gouvernement indonésien (1977–99) et le programme de huit ans du gouvernement ghanéen (1992–2000). On ne préconise pas, loin de là, que les gouvernements soient les seuls à mettre en œuvre des programmes d'éducation de base des adultes: en Ouganda, les agences non gouvernementales réalisent des programmes tout aussi efficients quoique naturellement à une échelle moindre. On pourrait citer de tels exemples dans beaucoup de pays. En fait, l'efficience potentiellement égale des programmes gouvernementaux et non gouvernementaux ouvre la voie au partenariat positif tenté par le gouvernement indien en 1978: il s'offrit de cofinancer les programmes des organismes privés. Ce principe se retrouve dans le partenariat contractuel du gouvernement et des organisations non gouvernementales du Sénégal que la Banque mondiale appuie depuis 1996. Dans le domaine politique, l'important est que ce cadre, qui encourage la complémentarité et le partenariat actif entre les gouvernements et autres agences, servirait le mieux les intérêts des adultes qui ont besoin d'une éducation de base.

Ceci dit, soulignons le rôle important que jouent les ONG en prenant des initiatives dans des secteurs éventuellement négligés, en explorant des approches novatrices et en soutenant la conscience et l'intérêt publics pour l'éducation de base des adultes. Leur rôle en Ouganda a son pendant ailleurs, notamment en Inde – la Literacy House (Maison de l’alphabétisation) à Lucknow et la League of Social Services (ligue des services sociaux) du Bengale sont les premiers exemples qui viennent à l'esprit – l’Afrique du Sud et de nombreux pays d'Amérique latine.

De même, il serait utile de rappeler les expériences faites en Indonésie et en Namibie. En Indonésie, l'organisme public n'était pas désireux de faire des ONG ses alliées. D'un autre côté, en Namibie, ce furent les ONG qui semblèrent peu disposées à accepter l'invitation du gouvernement d'aider le programme national. Ce qui est sûr, c’est que l’histoire des relations entre un gouvernement et les ONG d’un pays affecte les possibilités et le développement du partenariat entre les deux.

Examinons maintenant la demande d'éducation scolaire et d'alphabétisation dans les sociétés où la scolarité n'est pas universelle et où de larges secteurs de la population continuent de survivre, s'ils ne prospèrent pas, sans école ou alphabétisation. On se penchera sur l'efficience des efforts déployés par les élèves pour maîtriser simultanément la lecture, l'écrituret l'arithmétique simple.2 On prendra également en considération l'usage que les adultes font de ce qu'ils viennent d'apprendre. Ensuite, la discussion portera sur la question de l'importance qu'accordent les apprenants eux-mêmes au savoir «fonctionnel» par rapport aux compétences en matière d'alphabétisation?

À la lumière des conclusions sur le contenu, on s'attachera alors à discuter de l'importance des méthodes pédagogiques pour l'efficience de l'apprentissage. Pour finir, on s'intéressera à une question pratique: l'expérience faite en Ouganda a-t-elle quelque chose à dire sur le recrutement, la formation, l'appui technique et la reconnaissance des personnes qui entreprennent d'enseigner ou d'animer des cours dans le domaine de l'éducation de base des adultes?

La demande en éducation et alphabétisation

Une constatation frappante des programmes d'éducation de base des adultes est que pas moins de 73 pour cent d'un échantillon national prélevé au hasard de sortants des programmes avaient déjà eu auparavant une expérience scolaire. Ce qui est encore plus frappant, c'est que la moitié de ces personnes scolarisées avaient fréquenté l'école entre 5 et 8 ans. Ensuite, bien que ces personnes aient réussi le test final, elles ont continué à suivre le cours d'alphabétisation pendant plusieurs mois.3 Ces faits ont leur équivalent en Indonésie et en Namibie. Le ministère indonésien de l'Éducation et de la Culture a constaté que deux tiers de l'échantillonnage avaient fréquenté l'école primaire pendant deux ans ou plus, tandis que Lind a été témoin d'un phénomène similaire en Namibie (1996). Au Sénégal, un programme pilote d'alphabétisation, le Projet Alphabétisation Priorité Femmes, constata au cours de sa première année que près de 10% des inscrites avaient été scolarisées dans le passé. Dans sa troisième année, cette proportion était passée à 18%.

Ces observations semblent indiquer que les personnes qui, pour une raison ou pour une autre, ont dû quitté l'école prématurément ou n'ont pas réussi à atteindre leurs objectifs personnels, utilisent les programmes d'éducation de base comme une «seconde chance» ou/et comme un moyen de retenir et d'accroître les aptitudes et le savoir qu'elles possèdent déjà. D'un côté, un tel comportement confirme ce que plusieurs observateurs ont noté: plus une personne a reçu d'éducation, plus elle a tendance à saisir les opportunités ultérieures d'éducation qui s'offrent à elle.

D'un autre côté, cela incite à s'interroger sur l'importance de la demande de la part de la population totalement non scolarisée et analphabète. Même là où les taux d'illettrisme adulte sont de 60 pour cent ou plus, suffisamment d'illettrés s'inscriraient-ils d'eux-mêmes pour justifier un programme? Ou bien ces programmes devraient-ils accueillir une part d'élèves ayant été scolarisés pour atteindre un nombre satisfaisant aux critères de viabilité? Inversement, le fait que des gens qui possèdent déjà quelques notions scolaires fréquentent les cours d'alphabétisation intimide-t-il beaucoup d'illettrés qui n'ont jamais fréquenté l'école et les décourage-t-il de s'inscrire de sorte que les programmes passent à côté de leur principal objectif? Comme ces questions n'ont fait l'objet d'aucune recherche suffisante, on ne peut encore y répondre.

Néanmoins, il est possible que la demande de la part des personnes défavorisées ayant été scolarisées soit l'une des causes qui pousse les programmes d'alphabétisation à aborder leurs intérêts et à négliger ceux des personnes même plus défavorisées n'ayaüt jamais été scolarisées. Là où tout semble l'indiquer, les concepteurs de programme devraient examiner si des approches spécifiques ne seraient pas nécessaires pour attirer les personnes réellement analphabètes et surmonter les facteurs qui causent leur manque de confiance en soi pour s'inscrire aux cours.

Le principal moteur de la demande semble très simple: la plupart des sortants veulent tout simplement savoir lire, écrire et avoir des notions d'arithmétique. En cela, ils ne sont pas seuls car, en Indonésie, en Namibie, au Sénégal et ailleurs d'autres ûnt donné une réponse du même genre. L'observation semble indiquer que là où la scolarité et l'alphabétisation se répandent, elles acquièrent une valeur en soi, distincte de leurs usages potentiels. Les personnes qui en sont dépourvues le ressentent comme un désavantage, même si elles ne sont pas à même d'en articuler la valeur pratique.

En ce qui concerne les aspirations à poursuivre l'éducation au-delà de la maîtrise des compétences de base, la preuve n'est pas concluante. En Indonésie, elles semblaient être modestes, car un pourcentage relativement bas d'apprenants avaient l'intention de participer à des programmes menant à une certification formelle. Par contre, en Namibie, le nombre de ceux qui s'inscrivaient dans le niveau 2 dépassaient de loin le nombre de ceux qui avaient réussi le test de niveau 1 l'année précédente, tandis que le nombre de ceux qui se sont inscrits au niveau 3 entre 1994 et 1999 dépassait celui de ceux qui s'étaient inscrits au cours de niveau 3 trois ans auparavant. Les facteurs en jeu dans les deux situations sont très différents et des recherches seront nécessaires à ce sujet.

Quoi qu’il en soit, les constatations faites en Ouganda confirment celles qui ont été faites dans d’autres pays multilingues, où seule la maîtrise d’une ou de deux langues officielles permet à leurs citoyens de comprendre les panneaux de signalisation, les documents et les procédures officiels et leur facilite l’accès à l’emploi rémunéré et salarié. Le souhait répandu en Ouganda d’apprendre l’anglais a son pendant dans toute l’Afrique et ailleurs.

Les conclusions pour une politique expérimentale à tirer de ces observations semblent de trois sortes.

Premièrement, là où les taux de scolarisation primaire sont relativement bas et où les écoles primaires sont inefficaces et incompétentes, les programmes d’éducation de base des adultes devraient être conçus pour attirer et accueillir à la fois les personnes jamais scolarisées et celles qui l’ont été insuffisamment.

Deuxièmement, bien que la fourniture d’un certificat et l’entrée dans des cours d’enseignement plus scolaires soient probablement désirables, car ils confirment que l’éducation de base peut ouvrir la voie à de plus hautes destinées aux plus ambitieux, cela n’est pas obligatoirement nécessaire.

Troisièmement, les efforts pour développer les moyens de combiner l’alphabétisation dans une langue vernaculaire à une instruction simultanée dans une langue officielle désirée devraient être encouragés et intensifiés.4

Une remarque finale: comme partout ailleurs, les programmes ougandais d’éducation de base des adultes attirent les personnes défavorisées. Dans leur rôle d’instruments d’aide à la réduction de la pauvreté, ils sont auto-ciblants. En ce qui concerne cet aspect, ils confirment des constatations faites dans pratiquement chacun des pays qui organisent des programmes de ce genre.

L’efficience des efforts déployés par les adultes pour s’éduquer eux-mêmes ainsi que pour maîtriser simultanément la lecture, l’écriture et l’arithmétique simple.

Les graphiques ci-dessus prouvent que dans les cinq tests d’alphabétisation et de calcul, même les adultes jamais scolarisés et ceux qui, bien qu’ils aient été temporairement scolarisés, ne savaient même pas écrire leur nom auparavant, maîtrisaient les compétences impliquées à un plus haut degré que les élèves d’écoles primaires qui comptaient trois et même quatre ans d’école. Cette constatation reste vraie même pour des adultes de plus de 50 ans dont les performances moyennes s’étendaient entre 7

D’une manière plus provocante, les constatations faites en Ouganda indiquent qu’au moins dans les limites de la simple lecture, écriture et calcul, les programmes d’éducation de base des adultes sont plus efficients que les écoles primaires.5 Les observations faites en Ouganda concordent avec celles faites au Népal où des femmes, après 9 mois d’éducation de base, avaient des résultats équivalents à ceux de filles ayant plus de 5 ans d’école primaire; des constatations identiques ont été faites en Indonésie.

Néanmoins, la prudence est de rigueur. Bien que les diplômés sans formation scolaire aient bien réussi le test de compréhension simple, ils n’ont pas obtenu en moyenne de résultats satisfaisants en ce qui concerne la compréhension plus complexe, le calcul et l’écriture. Ce qui est sûr, c’est que 200 à 300 heures de cours d’éducation de base suffisent en moyenne à un adulte illettré pour acquérir des compétences rudimentaires, mais elles ne suffisent pas à lui en assurer la maîtrise.6

Un deuxième fait qui incite à la prudence est que des adultes qui ont assisté à des cours de base d’alphabétisation pendant plusieurs années n’ont pas automatiquement accru leurs compétences. Par contre, chaque année de scolarité primaire suivie rendait ceux qui avaient été scolarisés mieux aptes à utiliser leurs nouvelles compétences en matière de lecture, d’écriture et de calcul. On pourrait en dégager la conclusion au niveau politique que l’éducation de base des adultes devrait, tout comme les écoles, prévoir des programmes progressifs et cumulatifs de plusieurs années – sur le modèle du module A en Indonésie avec ses 100 livrets, suivi du module B, ou bien les divers niveaux du programme national namibien qui vise délibérément à élever les compétences de base vers des niveaux de maîtrise de plus en plus élevés.

Les constatations faites en Ouganda confirment l’opinion courante en éducation des adultes que l’âge n’est pas forcément un obstacle au succès de l’apprentissage. Bien que le groupe d’âge des 16–29 ans ait obtenu les meilleurs résultats aux cinq tests, le groupe d’âge des 30–49 ans ne suivait pas loin derrière tandis que l’écart de la performance moyenne du groupe des 50 ans et plus était plus large mais pas choquant. Les programmes de l’éducation de base des adultes peuvent donc inclure tous les adultes, quel que soit leur âge: les agences offrant des programmes ne doivent pas se sentir contraintes de fixer arbitrairement des limites d’âge supérieure pour participer ou non à un programme.7

Décider si l’on doit imposer un âge minimum est une question à laquelle l’Ouganda n’est pas en mesure de répondre. Les programmes ougandais n’ont pas été affrontés, semble-t-il, à un phénomène constaté p. ex. au Bangladesh et au Népal, où les cours destinés aux adultes attirent un grand nombre d’enfants entre 11 et 14 ans qui n’ont pu être scolarisés. Cette évaluation ne peut donc contribuer à discuter comment on peut le mieux gérer ces groupes mixtes d’adultes et de pré-adolescents et si on doit imposer un âge minimum.

Les constatations faites en Ouganda montrent que, comme c’est le cas dans le monde entier, les adultes ont des aptitudes tout à fait différentes quand il s’agit de maîtriser de nouvelles compétences et d’assimiler de nouvelles informations: certains ont réussi brillamment leurs tests, alors que d’autres les ont réussis avec beaucoup de mal. En dépit de leur succès «moyen», elles signalent une fois de plus la nécessité de concevoir des programmes et des stratégies d’alphabétisation à même de répondre à une telle hétérogénéité.

En termes d’acquisition de nouveau savoir «fonctionnel», de la formation de nouvelles attitudes et de l’adoption de nouvelles pratiques, les constatations en Ouganda, tout comme en Indonésie, au Bangladesh, au Salvador, au Ghana, au Kenya, en Tanzanie et ailleurs, confirment que les participants aux programmes d’éducation de base se comparent en leur faveur avec les non-participants. Néanmoins, on constate trois faits saillants.

Premièrement, les différences entre participants et non-participants sont souvent minimes (voir tableau 5 ci-dessus). On en discutera ci-après les raisons possibles. Deuxièmement, on constate que seule une minorité de participants possèdent des connaissances sur certains points. Troisièmement, l’acquisition de nouvelles connaissances ne conduit pas nécessairement à développer de nouvelles attitudes, et développer de nouvelles attitudes ne conduit pas nécessairement à réviser ses comportements. En d’autres termes, les programmes d’éducation de base des adultes peuvent aider les gens à acquérir de nouvelles connaissances, mais ne garantissent pas de changements dramatiques d’attitude ou de comportement chez tous ou même la majorité de leurs participants. C’est ce qui ressort aussi des évaluations des programmes mis en œuvre au Kenya et en Tanzanie en 1988-1990. Malgré tout, l’information transporte bien sûr au moins les germes du changement.

Contenu des programmes: quelle importance les apprenants eux-mêmes accordent-ils au savoir «fonctionnel» comparé aux compétences de base de l’alphabétisation?

Nous avons indiqué plus haut que beaucoup, peut-être même la plupart, des participants aux programmes d’éducation de base souhaitent tout simplement se sentir capables de lire et d’écrire. Nous avions aussi noté que sur de nombreux points d’information, les différences entre les participants et les non-participants n’étaient pas grandes. Prises ensemble, ces deux observations impliquent-elles que la majeure partie des informations fournies par les programmes est déjà connue des participants, tout comme elle est déjà connue de leurs voisins?

Cela implique-t-il que les informations ne contribuent pas à l’efficience du programme? Au Népal, les personnes interrogées ont déclaré qu’elles savaient déjà beaucoup de ce que les abécédaires racontaient, mais qu’elles s’en accommodaient car ce qui leur importait était de lire et d’écrire à ce sujet. Les apprenants ont presque tous déclaré la même chose en Namibie, pour la raison supplémentaire que le cours leur permettait de se perfectionner dans la langue officielle, à savoir l’anglais. D’un autre point de vue, la Campagne d’alphabétisation totale mise en œuvre dans le district d’Ajmer au Rajastan, qui a connu un succès absolument ahurissant, n’a utilisé que des textes et des matériels d’école primaire pour enseigner à lire et à écrire aux adultes, et ne fournissait, semble-t-il, aucune information «fonctionnelle». On citera un exemple beaucoup plus ancien qui s’est passé à Dezful, en Iran, où les quatre apprenants les plus assidus et qui obtinrent les meilleurs résultats dans un cours pour agriculteurs, n’étaient pas eux-mêmes agriculteurs mais balayeurs de rue municipaux. Ils ingurgitèrent un programme contenant des informations «inintéressantes» pour eux, mais qui leur permettrait d’atteindre leur but qui était d’obtenir le diplôme prouvant qu’ils étaient alphabétisés.

Trois questions se dégagent de ces observations. Tout d’abord, quelle importance les participants accordent-ils à l’information «fonctionnelle» dans le contexte de l’apprentissage de compétences de base comme la lecture, l’écriture et le calcul? Les éducateurs d’adultes ont longtemps argumenté qu’une des causes principales des résultats décevants des programmes d’alphabétisation était leur focalisation sur les mécanismes d’alphabétisation et le fait qu’ils négligeaient ce qui intéressait les participants, leur était utile et immédiatement pertinent. Cet argument sous-tend le Programme d’alphabétisation des adultes axé sur le travail mis en œuvre par l’UNESCO dans douze pays à la fin des années 1960 et au début des années 1970 ainsi que la phrase de Freire «Lire le mot pour lire le monde»ý sans oublier les différentes adaptations des idées de Freire, la plus connue étant l’approche REFLECT développée par ActionAid. L’évaluation ougandaise, confirmée par les constatations faites au Népal et en Namibie, semble indiquer que la focalisation sur le processus d’alphabétisation pourrait être en fait très saine. Les résultats plutôt décevants des programmes d’alphabétisation pourraient être dus à d’autres facteurs, tels que des méthodes d’enseignement très ennuyeuses.

Cependant, la focalisation sur le processus d’alphabétisation ne doit pas entraîner une régression vers des méthodes à exercices répétitifs et l’apprentissage comme un perroquet, sans relation avec l’expérience quotidienne. Entre cette tradition et la concentration sur des compétences, il existe une troisième option, pratiquée le plus radicalement par REFLECT, mais présente aussi dans d’autres approches, d’alphabétisation par ses applications locales actuelles. On utilise par exemple les poteaux indicateurs, les formulaires, les lettres privées, les factures, etc. comme matériel à la fois d’enseignement et de démonstration des usages des compétences en matière de lecture et d’écriture. Il convient de noter ici que des gens officiellement illettrés ont üussi utilisé des matériels comme les étiquettes et les affiches pour s’inculquer les rudiments de lecture et d’écriture qui leur étaient nécessaires dans leur milieu. L’évaluation semble indiquer que les programmes ougandais, comme peut-être la plupart des autres, ne portent aucune attention à ces acquis ni ne bâtissent sur eux.

La seconde question est la suivante: si l’information «fonctionnelle» n’est pas cruciale pour les participants, les concepteurs de programmes doivent-ils passer leur temps à déterminer quelles informations il faut transmettre et quelle est la meilleure manière de le faire? Ne devraient-ils pas mieux s’employer à concevoir d’autres voies pour mettre à même les participants de maîtriser le processus?

Cependant, si l’information «fonctionnelle» reste importante aux yeux des bailleurs des programmes et à leurs concepteurs à cause de sa contribution potentielle à l’éducation et au développement et de son aptitude à accroître l’intérêt, l’engagement et l’apprentissage efficient des participants, une troisième question se pose alors. Les éducateurs d’adultes ont constaté depuis au moins 50 ans déjà que les adultes en savaient déjà long, de sorte que le nouvel apprentissage devait bâtir sur ce savoir et non le répéter. Les expériences citées semblent indiquer que les concepteurs de programmes ne s’inquiètent pas de connaître ce que les participants savent déjà. Au lieu de fournir aux participants des connaissances supplémentaires, ils leur font remâcher inutilement des choses qu’ils savent déjà. Ce faisant, ils semblent risquer que leurs propres programmes manquent d’efficience en ennuyant les participants. La troisième question est alors: les éducateurs d’adultes sont-ils des apprenants lents?vOu bien l’obligation de produire rapidement de nouveaux programmes les empêchent-ils de suivre leurs propres conseils?

Quelle importance a le choix des méthodes didactiques pour aider les adultes à apprendre avec efficience?

Les éducateurs d’adultes étant partisans d’utiliser des contenus immédiatement pertinents, intéressants et attirants pour les apprenants adultes, ils se font donc les champions de méthodes pédagogiques axées sur l’apprenant, participatives et interactives. Comme l’évaluation ougandaise a été faite a posteriori, elle n’a pas été en mesure d’estimer dans quelle mesure les programmes du gouvernement et des autres agences observaient ces préceptes ou d’évaluer leur efficience comparée. Elle n’a pu que tenter une comparaison limitée de deux formes de résultats: les résultats des tests du Programme d’alphabétisation fonctionnelle des adultes du gouvernement et du programme REFLECT8 d’ActionAid et les réponses aux questions sur les attitudes. Du fait de ces limites, l’évaluation n’a pas été à même de juger si un programme était plus efficient qu’un autre.

Même si une évaluation comparative avait été possible, les variations dans la mise en œuvre réelle des méthodes prescrites auraient pu compliquer la question. Certaines observations indiqueraient que tous les alphabétiseurs ne se conforment pas fidèlement à leur formation et aux guides pédagogiques – REFLECT a relaté une déviation particulière au Salvador (Archer & Cottingham, 1996) tandis qu’au Népal et en Namibie, les chercheurs ont noté que les alphabétiseurs modifiaient souvent leur approche «d’une manière régressive». Le problème vient en partie des difficultés que les alphabétiseurs doivent affronter en employant des méthodes «axées sur l’apprenant».9 Ce sont pour une part les attentes des apprenants eux-mêmes qui y font obstacle. En effet, les participants semblent s’attendre à rencontrer les routines, les matériels, les processus et les actions autoritaires que leurs enfants ont subis à l’école et ýes considèrent comme partie intégrante d’une éducation correcte. Les instructions contenues dans les guides à l’intention des alphabétiseurs d’inciter et d’animer des discussions sur des questions spécifiques sont ignorées. Même dans les groupes REFLECT, quelques alphabétiseurs et participants attendaient au moins quelques textes conventionnels et du matériel de lecture.

En un mot, l’évaluation ougandaise ne répond pas à la question de savoir si une méthode d’enseignement est plus efficiente qu’une autre dans tous les cas ou bien si une approche marche mieux pour certains objectifs d’apprentissage, alors que d’autres objectifs sont plus faciles à atteindre par d’autres approches. Le plus important est peut-être l’engagement et le savoir-faire du formateur et l’efficience de la formation et du soutien qu’il/elle reçoit.

L’évaluation ougandaise laisse également dans l’ombre la question de ce qu’on appelle parfois « post-alphabétisation». En dépit du manque de littérature, de schémas de crédit et de groupes ou de coopératives pour des formes variées de développement, une majorité de personnes formées échantillonnées ne semblaient pas seulement faire usage et maintenir leurs acquis en matière d’alphabétisation, mais avoir aussi amélioré leurs revenus et leur niveau de vie, modestement toutefois. Si cela doit prouver quelque chose, ce serait plutôt que les concepts «d’alphabétisation initiale» suivie d’une «post-alphabétisation» devraient faire place au concept d’apprentissage continu tout au long de la vie.

Animateurs/formateurs, leur formation et leur rémunération

L’évaluation ougandaise est aussi muette sur les questions relatives aux animateurs eux-mêmes. Elle distingue les animateurs du programme gouvernemental (FAL) et ceux engagés par les autres organisations. Tous les animateurs du FAL étaient bénévoles – tandis que les autres recevaient au moins des honoraires –, avaient en moyenne fréquenté moins longtemps l’école que les autres, avaient suivi une formation d’animateur moins longue; ils ne suivaient aucun cours de recyclage et n’étaient pas ou très peu encadrés. Or, leurs apprenants s’en sont tirés tout aussi bien que ceux des autres programmes dans les tests de compétence en matière de lecture et d’écriture et dans leurs réponses aux questions sur l’information fonctionnelle, les opinions et les pratiques. L’incertitude que cela engendre sur ce qui serait l’attitude la plus sage à adopter en ce qui concerne les animateurs a son pendant dans les expériences contradictoires faites partout dans le monde.

En Inde, par exemple, toutes les campagnes d’alphabétisation totale réussies ont recouru à des animateurs volontaires. Au Bangladesh, Nijera Shikhi va encore plus loin: il exige de ses organisateurs qu’ils paient une petite contribution pour avoir le privilège d’organiser des cours car il laisse entièrement aux apprenants le soin de récompenser les animateurs. Au Ghana, le programme national d’alphabétisation fonctionnelle fait appel à des volontaires, mais dans ses premières phases, il accordait des récompenses prestigieuses sous forme de bicyclettes et de machines à coudre. L’Indonésie rémunère financièrement ses animateurs, mais à des taux si bas que leurs salaires ne représentent qu’un pourcentage négligeable des salaires des instituteurs d’école primaires. Les animateurs namibiens par contre sont employés à temps partiel et leur salaire est fixé en rapport avec les salaires des enseignants d’écoles primaires, tandis que le Sénégal a institutionnalisé les honoraires des animateurs en les intégrant aux contrats avec les organisations d’éducation sans but lucratif. Au Népal, les animateurs se trouvent à mi-chemin entre les volontaires et les employés rémunérés: ils sont payés au résultat, c’est-à-dire au nombre d’apprenants qui ont réussi l’examen de fin de cours.

Tous les programmes mentionnés peuvent se prévaloir de bons taux d’efficience. Tous ont aussi des faiblesses. En tirer une conclusion catégorique pour le futur est toutefois risqué. On pourrait formuler les hypothèses suivantes. Concernant les campagnes à court terme pour lesquelles on peut mobiliser un nombre relativement important de personnes ayant une formation scolaire comme animateurs/formateurs temporaires, satisfaits de récompenses volontaires et morales, cela est probablement faisable. La bonne volonté des volontaires ougandais, combinée à leur espoir d’une récompense matérielle sur le long terme, semble confirmer ce point de vue.

Cependant, l’opinion largement partagée que l’apprentissage tout au long de la vie devient de plus en plus nécessaire pour soutenir le développement, remet en question l’utilité des campagnes à court terme. Les schémas d’éducation permanente exigent des éducateurs plutôt plus formés que moins. À quoi les motivations et les récompenses de tels éducateurs ressembleront et comment elles seront mesurées pourrait dépendre de trois facteurs: l’un est l’adhésion de la population adulte à la nécessité de la formation continue, accompagnée de la volonté de contribuer aux coûts d’organisation de celle-ci; le second est la disposition des gens à donner leur temps sans grande contrepartie pour aider leurs voisins, ce qu’on appelle parfois l’énergie sociale; tandis que le troisième, peut-être le plus important, est l’intensité et l’endurance de l’engagement que les leaders locaux et nationaux sont prêts à consacrer aux programmes de soutien à l’éducation de base des adultes.

Résumé des conclusions de l’évaluation

En résumé, l’évaluation faite en Ouganda a confirmé des observations faites dans le monde entier. Elle a aussi laissé quelques questions en suspens.

Les questions laissées en suspens sont [1] la questions de la rémunération des animateurs, [2] l’équilibre recherché entre quatre éléments des programmes de l’éducation de base des adultes: les compétences de base que sont la lecture, l’écriture et le calcul, l’information fonctionnelle privilégiée par les sponsors, l’information contextuelle conçue selon les situations locales et la promotion de la prise de conscience et le renforcement de l’autonomie; [3] l’efficience relative des différentes méthodes d’instruction employées; et [4] l’importance de la demande en éducation et en alphabétisation dans la population adulte n’ayant jamais été scolarisée et illettrée.

L’évaluation ougandaise tend donc à confirmer ce qui suit:

  1. l’importance primordiale d’une soigneuse préparation pour que la mise en œuvre soit compétente;
  2. les avantages de partenariats positifs, complémentaires entre les gouvernements et les autres organisations concernées;
  3. la nature de l’éducation de base des adultes comme instrument d’aide aux personnes défavorisées;
  4. la nécessité d’intégrer deux sortes de demandes en éducation de base pour les adultes: celle de personnes n’ayant jamais été scolarisées et celle de personnes ayant été partiellement scolarisées;
  5. la capacité des adultes de tout âge à apprendre les notions de base de la lecture, de l’écriture et du calcul plus rapidement que les enfants des écoles primaires; inversement, les avantages qu’apporte le fait que tous ceux qui le veulent, puissent assister aux cours, peu importe leur âge;
  6. l’aptitude diverse des personnes à maîtriser les compétences et le savoir, et la nécessité de le prendre en compte;
  7. le besoin d’une vision à plus long terme de l’alphabétisation comme part d’un processus progressif et cumulatif rendant apte l’adulte «moyen» à atteindre une maîtrise adéquate des compétences de base et à continuer à apprendre comment les appliquer productivement;
  8. le défi qui consiste à développer des moyens de combiner l’éducation de base dans une langue vernaculaire à une introduction à une langue officielle qui facilite l’affrontement à une société plus vaste.

Notes

1 L’équipe qui a projeté et mis en oeuvre l’évaluation se composait du prof. Anthony Okech et de Mmes. Teresa Kakooza, Anne Katahoire et Alice Ndidde du Départment d’études sur l’éducation des adultes et la communication de l’université de Makerere, du prof. Roy Carr-Hill des ­universités de Londres et de York. Je suis redevable à Roy Carr-Hill, Jan Leno, Uta Papen et Anna Pant-Robinson des commentaires et suggestions d’amélioration de la première version du présent article. J’assume la responsabilité de toutes les inexactitudes.

2 L’évaluation n’a pas tenté de mesurer l’efficience des programmes en termes de pourcentage des inscrits qui ont suivi le cours jusqu’au bout et réussi le test final. Cependant, certaines des données semblent indiquer que dans l’ensemble, quelque 72,8 pour cent des nouveaux inscrits pourraient avoir suivi leurs cours avec succès, ce pourcentage variant de quelque 33,9 pour cent dans le district comptant le moins de succès jusqu’à 99,2 pour cent dans celui présentant le plus grand nombre de succès. Une moyenne de plus de 70 pour cent dépasserait la moyenne des taux d’efficience observés dans d’autres pays.

3 Il serait prudent de noter que les élèves qui «s’inscrustent» sont un phénomène qui apparaît surtout dans les communautés rurales. Il est moins fréquent dans les cours d’alphabétisation urbains, mais l’étude ougandaise n’en apporte aucune preuve.

4 La description, et plus encore la défense, d’une stratégie ou d’une méthode spécifique pour de tels efforts dépasse les limites du présent chapitre. Qu’il suffise de signaler que plusieurs options sont concevables, allant de celle d’inclure une composante mineure «officielle» dans un programme vernaculaire jusqu’à celle d’offrir un programme entièrement dans une langue officielle. La faisabilité d’une option spécifique dépendrait bien sûr des apprenants et de la compétence de leurs formateurs.

5 Cette observation n’est pas un argument visant à substituer l’éducation de base des adultes à l’école primaire. Le programme scolaire primaire est beaucoup plus large que la plupart des programmes d’éducation de base des adultes car des «aspects cachés» comme l’apprentissage de la discipline et l’apprentissage systématique, continu et à long terme, sont sans doute la source majeure des bénéfices sociaux et économiques de la scolarité.

6 Les implications pour les écoles primaires ne sont pas du domaine du présent article.

7 Les plus sérieuses contraintes pourraient résider dans les normes de la culture locale. En Ouganda comme au Ghana, en Namibie et au Népal, les adultes d’un certain âge désireux d’apprendre à lire et à écrire courent le risque de se ridiculiser auprès de leurs familles, amis et voisins, ainsi qu’auprès des politiciens qui estiment qu’investir dans ces gens-là est un gaspillage de ressources.

8 La différence majeure entre les deux programmes est que le gouvernement utilise des abécédaires, tandis que REFLECT s’attache en principe à réaliser avec ses participants un programme sur mesure issu de leur propre situation, leurs conditions de vie et leur environnement.

9 Les jeunes brigadistas au Nicaragua se sont heurtées à beaucoup de difficultés en voulant inciter à des discussions et en en animant sur un grand nombre de thèmes, et on a constaté la même chose en Namibie.

Bibliographie

Archer, D. and S. Cottingham, 1996, Regenerated Freirean Literacy Through Empowering Community Techniques

Lind, A., 1996, Free to Speak Up, Overall Evaluation of the National Literacy Programme in Namibia, Directorate of Adult Basic Education, Ministry of Basic Education and Culture, Windhoek

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